L’expérience HMDS, vue de l’intérieur.

Salut c’est Stan, le co-fondateur d’Explora Project. En septembre 2022, je participais au Half Marathon des Sables sur l’île de Fuerteventura, la deuxième plus grande île des Canaries, en Espagne. Une expérience que j’avais profondément envie de vivre. Je te raconte tout ça !

En bref

Participer à une course à étapes dans le désert est une aventure très particulière.

Les 4 éléments clés qui vont faire la différence : 

  • Le poids de ton sac. Viser 5kg hors eau pour 120km (format Half Marathon des Sables) et viser 8kg pour un full format 250km. Les techniques sont nombreuses mais la règle de base : avoir chaque item le plus léger possible, reconditionner les lyophilisés, ne prendre aucun superflu, sacrifier le confort le temps de la course.
  • Ton entraînement bien sûr. C’est une course à étapes donc 2 éléments vont entrer en compte : ta capacité à pouvoir courir la distance de chaque étape (avoir un entraînement spécifique pour courir l’étape longue de 60 à 90km) ET ta capacité à les enchaîner sans jour de repos, donc ta capacité de récupération. Il faudra donc s’entraîner dès le début de la préparation à enchaîner les séances 2 jours d’affilée, puis 3, puis 4 etc..
  • Ta capacité à t’alimenter correctement sous forte chaleur. Pour ne pas se mettre dans le rouge il est important de respecter scrupuleusement 3 éléments : ne pas être en sur-régime (ton entraînement t’aidera à déterminer à quelle allure cela correspond), boire régulièrement de l’eau et des électrolytes en quantité égale (à choisir, que des électrolytes), manger régulièrement même si tu n’as pas faim.
  • Ta capacité d’automédication (et de prévention des blessures). 3 risques majeurs : les pieds (crème tano/nok le plus longtemps possible avant l’épreuve), les frottements corporels (protection, pansements, vaseline), les coups de soleil / insolation (chapeau couvrant, écran total partout). 

Je te recommande vivement de t’inscrire à plusieurs, l’énergie du groupe permet de faire ressortir une force mentale parfois insoupçonnée. 

Tu veux plus de détails, alors je te raconte tout !

Le récit de ma course

Cette course j’avais envie de la vivre depuis quelques années déjà. 

Après mon expérience à Atacama (en 2018 j’ai participé à un 250km en 6 jours au Chili – lien de l’article de blog) qui m’avait changé, j’ai toujours voulu me relancer dans un format de course à étapes en autonomie. Quand mon ami Goulven m’a proposé de participer en Juillet dernier avec quelques autres personnalités de son agence, j’ai tout de suite dit “oui” !!

Oui, car le faire avec un petit groupe c’est super riche et cela peut transformer ce défi sportif en une aventure humaine littéralement inoubliable.

Le groupe WhatsApp est créé, les premiers messages de préparation du sac sont échangés, la pression monte tranquillement.  

Nous sommes à la base un petit groupe de 5 en plus de Goulven : Greg, Charline, Antoine, Dorian et moi. Charlotte, Guillaume et Raphaël des copains de Goulven et Greg se sont aussi inscrits. La maman et la tante de Goulven complètent le groupe.

On a été sollicités en tant que créateurs de contenu et notre enjeu est de partager notre aventure de l’intérieur en images sur nos réseaux sociaux. 

Alors on s’y met dès les sessions d’entraînement et la préparation du sac à force de stories compte à rebours, time lapse de prépa du sac ou live pour partager ses conseils et plans d’entraînement. 

En vrai, je le sens bien ce groupe. Il est super différent et hétéroclite et les échanges sont déjà nourris par nos différences de point de vue : Dorian, coach running – marathonien en moins de 2h30 – mais néophyte en trail running. Greg, kiné et connaisseur de l’épreuve qu’il avait déjà faite au Pérou il y a quelques années. Charline, sage-femme sportive pour qui tout est nouveau. Antoine, fitness boy expert en nutrition (et en vachement d’autres trucs ai-je découvert plus tard) qui est super costaud mais qui s’est mis à la course à pied en juillet pour la première fois. Goulven, agent hyper busy qui s’est mis à la course (et au sport) il y a 6 mois à peine. Moi, à priori, je suis le moins novice sur l’épreuve, tant dans la connaissance de son déroulé que sur l’effort sportif et mental à mobiliser. 

Je me sens nécessairement avoir un rôle de réassurance et de partage d’expérience vis à vis du groupe. 

Je suis assez confiant sur les capacités physiques de chacun mais je ne mesure pas encore bien les ressources mentales que chacun saura mobiliser en temps voulu. Car ça va être dur. Je crois qu’ils ne réalisent pas bien encore en fait. Greg fait un vocal au groupe à quelques jours du départ en ce sens, les réactions sont confiantes. 

Je me dis alors qu’on peut tous être finishers. 
Si aucun imprévu de taille ne nous tombe dessus. 

Jour 1. Samedi 23 septembre 2022

Après un train Genève-Paris de bon matin je retrouve le groupe à Orly. Chacun a l’air prêt avec son petit sac WAA sur le dos contenant l’indispensable pour participer – à ne pas mettre en soute pour ne pas risquer de le perdre et de pas pouvoir courir… Enfin chacun a l’air prêt sauf Dorian, complètement à l’arrache sur le matos obligatoire. “J’ai rien” nous lâche-t-il à l’aéroport. Je commence à découvrir un type super touchant par son authenticité et sa simplicité. Ancien finaliste de Koh Lanta, il avait marqué les esprits par son niveau sportif, son esprit d’équipe mais aussi par son manque de sens de l’orientation qui deviendra même une épreuve éponyme : la course “Doriantation”. Il est fin et sec, un gars taillé pour la course à pied. Le meilleur du groupe sans nul doute, avec une vitesse de fond qui peut selon moi lui permettre de gagner l’épreuve. 

Tout le groupe nous voit comme les 2 plus rapides d’entre nous avec des chances de Top 10 pour Dorian et Top 30 pour moi. Même si une inconnue subsiste : quel sera le plateau “élite” et quel niveau les 20/30 premiers de la course auront ? Nous sommes environ 800 sur l’épreuve donc les jeux sont assez ouverts en réalité !

Les 4h d’avion sont 4 premières heures de discussions continues, on apprend à se connaître plus en profondeur. On se connaît tous sur les réseaux mais pour la plupart on ne s’était jamais vus en vrai encore. Derrière les personnages “sociaux” se cachent parfois des facettes plus complexes, des histoires touchantes, des combats en cours mais toujours je trouve une force de travail, de détermination, de résilience pour transformer une passion en un métier plein de sens. 

L’orga du HMDS nous attend à l’aéroport, Cyril CEO, Ferdinand COO – participant Explora d’ailleurs -, Axelle et Laure du Content & Social (elles ont d’ailleurs fait du gros travail sur la prise de contenu et les réseaux pendant la semaine). Super accueil plein d’énergie, puis direction le complexe de Playitas où nous séjournerons avant et après la course. 

Après des tentatives gênantes en espagnol au moment du check-in, j’opte définitivement pour l’anglais et ce jusqu’à la fin du séjour. 

Néanmoins j’ai fait illusion auprès de Dodo qui me demande combien de langues je parle. Je tente un 5. Il mord. Il le croit encore. 

Je partage d’ailleurs ma chambre avec Dodo l’animal. Je suis super content car en plus d’être un super gars, il est plein de bons conseils running. 

Une bière le samedi soir pour fêter ensemble l’arrivée sur site. On reste calmos, la semaine va être longue.

La Team Fajitas

Jour 2 & 3 – Dimanche 24 & lundi 25 septembre

8h30. Running à jeun tous les 2 avec Dodo 🦤 sous une pluie battante. Veille de course donc soft. On part sur 40min de course à 12km/h puis exercices d’assouplissements et 4 lignes droites en sprint pour les sensations. On tourne 1 ou 2 petits Reels coaching running au passage sur quoi faire dans les quelques jours qui précèdent une grosse course (ici pour les 👀)

On s’est donné rdv pour aller chercher nos dossards avec toute la team Fajitas (oui c’est notre nouveau nom) à 11h. Il est un peu con ce nom mais c’est le principe des noms de team après tout. 

L’effervescence générale se fait sentir alors que la file d’attente s’allonge à l’entrée de l’immense gymnase et que nous réalisons le monde aux côtés duquel nous allons vibrer. 

On échange quelques photos avec ceux qui nous connaissent des réseaux (bon clairement plus Greg-Major Mouvement que nous, la dessus pas de doute 😂). Le gars est tellement connu et reconnu c’est fou tout ce qu’il lui est arrivé ces 3 dernières années. Et il le mérite car quelques jours à ses côtés m’ont montré une nouvelle fois à quel point il était bosseur et consciencieux.

Vérification du matos obligatoire, photos avec dossard, distribution des cadeaux partenaires (coucou Respiiiiire). 

Les derniers échanges avec l’orga nous font rapidement comprendre que le départ ne sera probablement pas le lendemain mais décalé d’un jour. L’ouragan Hermine qui a frappé l’île depuis la veille au soir a rendu impraticable la plupart des sentiers et des lieux de bivouac prévus. On sent quand même que tout est fait pour maintenir “un” événement malgré les conditions dantesques.

Après une après-midi à discuter des scenarii au grand bar-paillote de l’hôtel, préparer les contenus de la semaine, tout en jouant à un ersatz du loup-garou à 10 (donc la partie a clairement duré 4h) en sifflant un kambutcha fruits rouges qui jouera un rôle technique dans mon processus digestif, le temps était venu d’aller au Briefing Général avec tout le monde dans le grand gymnase. 

On retrouve sur le chemin Marine et Juan de la team Orange Running avec qui nous passerons clairement toute la semaine. Je ne les avais jamais rencontrés. Simples, sympas, collectifs, pleins d’énergie. J’ai adoré ces 2 personnes aux styles très différents. La suite de la semaine vous le prouvera (on parlera sanglier 🐗).

Le gymnase est plein. Impressionnant. Les bruits sont confirmés. Le départ est décalé. La course commencera avec l’étape longue. L’ensemble sera un peu réduit de 120 à 100km. On nous confirmera le lendemain que les bivouacs ne peuvent pas être maintenus et que nous rentrerons chaque soir à l’hôtel. 

C’est sur le coup super décevant il faut dire ce qui est. Marine pleure discrètement. Greg la console. Les participants continuent de leur demander des photos comme si de rien n’était. Moment un peu étrange pour être tout à fait honnête.

La team se prépare néanmoins en mettant de côté ce sujet du bivouac, demain 60km nous attendent, pour tout le monde sauf Greg (qui avait déjà participé au HMDS Pérou), Dorian (qui avait participé à la MCC en août dernier) et moi, ce sera une grande première… !

Avec Juan et Dorian

Jour 4 – Mardi 26 septembre – Etape 1 (60km, 1500m D+)

L’ambiance est électrique au petit matin, chacun arrive au petit déjeuner prêt avec son sac. Les regards sont assez parlants, les visages tendus. Une appréhension plane mais personne ne panique. L’abandon n’a jamais été évoqué les jours précédents, chacun je crois est persuadé qu’il va finir cette course, qu’elle qu’en soit la manière ! 

Après quelques prises de contenu avec la team, le temps est venu de prendre la route pour se rendre sur la ligne d’arrivée. Nous apprenons un peu tard que les départs se feront par vague en continu à l’arrivée de chaque bus. Autant vous dire que nous avons clairement raté les premiers départs – en cause nos frasques digitales ! On arrive sur la ligne de départ reconstituée et c’est déjà le moment de se lancer avec les 50 de notre car. 

On sait déjà que nous avons approximativement 40 min de retard sur le premier bus et derrière nous encore 1 ou 2 car vont arriver. Dodo et moi –  assez stratèges de course parce que concernés par le résultat – sommes un peu déboussolés. Nous sommes partis rapidement sur les 20 premiers kilomètres de course à environ 12-13km/h (un peu trop vite pour moi sur un 60km et un peu trop lentement pour Dodo en réalité), dépassant tout le monde mais ne sachant toujours pas comment nous nous plaçons au général.

On se fait dépasser par un espagnol en short rose qui, apprendra-t-on plus tard, visait la victoire sur le 40km et pas sur le 60km. En tout état de cause, Dodo est piqué au vif, je le sens monter en pression.

“Aller va le croquer Dodo” je lui glisse, et il part comme un chien de chasse dans la seconde.

Le soleil tape fort, il doit être pas loin de midi au 20km. J’ai ma casquette Explora en arrière, ce n’était pas une bonne idée… allais-je découvrir quelques heures plus tard.

Je marche rapide dans les montées et relance systématiquement avant la fin des montées pour garder un bon rythme. J’ai vraiment les jambes en très bon état mais je sens que mon estomac se noue et je commence à avoir vers le 30e kilomètre des nausées persistantes. Je n’ai mangé qu’une barre depuis 3 heures et trop d’eau par rapport aux électrolytes. J’ai fait en fait, exactement ce qu’il ne fallait pas faire… L’euphorie du début d’épreuve, un rythme un peu trop fort pour passer un peu de temps avec Dodo m’ont fait oublier les basiques !

Je m’arrête au ravito du 35e. Je suis à 2 doigts de vomir. Je n’arrive plus à manger du tout. J’ai le moral à zéro parce que j’ai déjà été dans ce cas de figure deux fois ces dernières années et je sais que ça finit mal. Les nausées cesseront environ 2 heures après l’effort quoi que je fasse. La première fois c’était pendant l’Ecotrail de Paris 86km en 2015 ou 16 – j’avais fini en marchant et pleurnichant de douleur. Le seconde pendant ma 2e participation à la CCC où j’avais abandonné ma seule et unique course à ce jour, sur près de 100 dossards.

Tout ça pour dire que, comme l’abandon n’est pas une option, je sais que je vais souffrir pendant au moins 3h quoi que je fasse maintenant. 

Alors bien sûr, ce n’est pas agréable mais pour m’être déjà retrouvé plusieurs fois dans ces situations-là en course d’ultra, je sais que je vais y arriver. 

Je repars du ravito après avoir appris que j’étais à priori dans les “15 à 20 premiers“, ça me remet un petit mood positif pour les minutes qui suivent. Rapidement, je croise la route de Matthieu qui me dépanne d’une pastille d’électrolytes, on échange quelques mots, je lui dis de continuer je suis trop lent avec mon estomac dur comme une pierre qui me fait souffrir à chaque pas. 

J’ai encore illustré ce dicton qui dit qu’en trail le moment où ça va le mieux, c’est juste avant le moment où ça va le moins bien !

Peu à dire de cette période-là, car j’ai peu de souvenirs. J’étais concentré sur ma douleur et avancer quel que soit mon état. Je me souviens d’un dénivelé important, de mini-vomitos ici et là, personne ne m’a dépassé – étonnement – peut-être même en ai-je dépassé quelques uns.  Je glisse dans un grand black-out jusqu’au 50e kilomètre où je m’arrête 8min au ravito, vraiment pas bien. Un médecin m’explique que j’ai trop bu d’eau claire (sans électrolytes) et pas assez mangé tôt dans la course. Je bois 1 litre de bouillon de poule dégueulasse ultra salé. Il me dit de ne rien boire jusqu’à la ligne d’arrivée. Il me dit que ça ira mieux probablement après la ligne d’arrivée. 

Soit, je repars pour les derniers 11km de plat sur un meilleur rythme. Moralement il m’a remis en selle ce doc-là. Toute la semaine à chaque fois que nos regards se croisaient, je lui adressais un petit signe de tête en guise de remerciement. La ligne approche, elle se tient là après une belle côte de près de 1km. 

Je reprends un rythme assez soutenu, non pas parce que j’ai moins mal mais parceque je sens que c’est presque la fin de ce calvaire intestinal. Un peu comme quand tu n’as plus d’essence, mais il te reste toujours la réserve pour aller chercher un dernier effort, une dernière accélération. 

Je passe la ligne. Je pousse un cri, mon cri, celui que je pousse à chaque ligne d’arrivée “difficile”. Il m’avait accompagné sur de nombreuses étapes très douloureuses de mon record de la traversée de la France en courant en 2011. C’est un cri qui expulse toute la douleur que j’ai contenu pendant des kilomètres. Qui marque la fin de la difficulté. 

La team du HMDS saisit en photo cet instant de délivrance et de fierté d’avoir tenu bon. 

Je me classe en définitive 10e de cette étape, une grosse surprise pour moi ! Je suis quand même un peu frustré d’avoir fait cette erreur de débutant de partir trop vite sur 30km alors que je connais très bien la distance et tout ce que tu crois gagner dans la 1ère moitié tu le perds bien souvent x2 dans la seconde.

Une course d’ultra ne peut se remporter qu’en étant régulier.  

La soirée est réparatrice bien qu’un peu galère pour les retours en bus. Demain étape de vitesse !

Une fine équipe

Jour 5 – Mercredi 27 septembre – Étape 2 (13km, 600m D+)

Les jambes vont bien au réveil puisque c’est mon ventre qui m’a contraint et pas mes jambes sur l’étape de la veille. Super petit dej – brunch avec la team Fajitas-Orange, les esprits si ce n’est les corps ont l’air bien marqués par l’étape de la veille. Charline et Guillaume sont rentrés vers 2h du matin à l’hôtel ce qui n’aide pas à la récupération. La plupart des copains de la team n’ont jamais enchaîné des courses comme ça donc forcément le fait de se rhabiller en habits de course crado le lendemain d’une course de 60km pour repartir au charbon… bah ça peut paraître un peu absurde la première fois. 

Mon objectif est évidemment de garder cette 10e devenue 11e place au petit matin (sais pas pourquoi) ou même idéalement d’accrocher la 9e place ! Si 1min me sépare du 10e, plus de 10 min me séparent du 9e donc ce sera délicat à rattraper sur l’épreuve du jour. Derrière moi c’est un mouchoir de poche sur les 11-16e place donc gros risque de perdre des places aujourd’hui en fait !

Au menu du jour, 13 km répartis en 3 bonnes bosses de 200m de D+. C’est pas de l’alpin certes, mais il faut s’imaginer que le rythme ne sera pas le même en tête de course non plus. Ça va courir 100% du temps aujourd’hui !

L’effort est diamétralement opposé à celui d’hier, aujourd’hui c’est cuisses qui brûlent et cardio à fond. On se lance à 13h et plus de 27 degrés au compteur. Course dans du sable fin chaud et dans des pierriers de roches volcaniques donc ça va chauffer !!

Ma stratégie du jour : ne pas me brûler sur les 5 premiers km. En tant que 11e, je dois rester au contact visuel du bloc de tête le plus longtemps possible.

Après 2-3 photos de groupe avec la team, le départ est donné. L’organisation avait pris soin de mettre les 25 premiers du classement (ou les 50 peut-être) dans un petit sas devant pour être sûr que personne ne soit renversé au départ… car évidemment… devant, les 3 espagnols sont partis comme des bombes. Suivi par Dodo qui souhaite rentrer sur le podium et qui ne peut pas les laisser creuser un écart avec lui. Pourtant c’est ce qui se passe. Les 3 espagnols courent à 16km/h dans le sable mou pendant 2 bons kilomètres. Franchement c’était assez impressionnant. Dodo et quelques autres sont un cran derrière. Et je suis dans le cran suivant. Sûrement 15e ou quelque chose comme ça après 3km. 

Franchement, le rythme est vraiment costaud, la chaleur est pesante et le terrain ne se prête pas à des allures pareilles. En revanche, des différences d’allure importantes apparaissent dans les montées. Dès la première bosse, certains sont carbonisés du début de course. Ils marchent avec déjà les mains sur les cuisses et le pas lourd. L’euphorie du départ de course, la musique électro de la ligne de départ, l’idée d’une étape du jour très courte n’ont pas aidé. J’assure le coup donc je cours très prudemment dans la montée de cette première bosse et je ne profite pas de mon moral assez confiant du moment pour pousser encore. Je sais néanmoins déjà à 5km de course que je finirai mieux que 15e. La première descente me fait à peine douter car je suis devant un maltais que je n’arrive pas à distancer alors que je prends tous les risques. Je dérape d’ailleurs sur un appui et m’entaille la main gauche qui saigne immédiatement. Je pousse fort sur cette descente et le maltais est toujours à 30m et s’accroche. On arrive sur le plat et je continue de pousser jusqu’au ravitaillement des 7km. 

Je ne m’arrête pas au ravitaillement. Je suis parti avec 2 gourdes à ¾ pleines soit environ 1.2L d’eau pour ces 13km, ça me semble toujours bien à vue de nez. Un plat de 2km me permet de creuser un espace et de sécuriser au moins une 14e après avoir dépassé le maltais.

J’ai des ressources. Le temps est venu de pousser. Au pied de cette 2e bosse, je ne vois personne devant moi. Puis plus haut dans les virages un point noir apparaît. J’ai 300 à 400m de retard sur le 13e. Je suis surement parti un peu trop prudent mais au moins je n’ai pas explosé et c’est quand même une 2nde partie de course bien plus agréable et excitante à négocier que celle d’hier !

J’attaque la 2e bosse fort. Je vois que le 13e se retourne, me voit puis disparaît dans un virage. Psychologiquement, il y a un truc à faire. Je bombarde pendant qu’il ne me voit pas. Je veux être dans son dos la prochaine fois qu’il se retourne. Là j’ai les cuisses qui brûlent très vite, je vide une gourde sur ma tête. Il fait très chaud. Je sens que tout le monde est au bord de la rupture dans cette ambiance barbecue à ciel ouvert. Je passe le virage à mon tour, je ne le vois pas il a déjà bifurqué. Le virage d’après est le bon, il est là à 10m trottinant sans conviction. Il a pris un coup de chaud. Je lui demande si tout va bien, il ne me répond pas mais me fait signe de continuer. Il est carbo. Je suis 13e.

Je vois assez vite un groupe de 2 coureurs devant à 200-300m, l’un avec un bon rythme. L’autre plus à la peine, je le rattrape en 1 à 2min. Il s’agit de Bastien, le copain de Dodo qui avait pourtant fini 5e hier sur le 62km, mais aujourd’hui, il s’est grillé sur le départ à l’espagnol à coup sûr. Je lui dis de rester avec moi, de ne pas me lâcher, de tenir bon. Il reste 1 minute puis baisse d’un cran et me laisse filer. Je suis 12e et déjà la fin de cette 2e bosse. 

Un espagnol puis un second se dessinent devant moi à flanc de montagne à 100-150m devant à peu près. Ils n’arrêtent pas de se retourner. Surtout le plus âgé d’entre eux. Ça veut dire qu’ils sont sur le bidon de réserve, qu’ils sont dans le doute sur cette fin de course qui s’emballe.

Je les rattrape, on attaque la descente qui est très technique et qui s’apparente plus à de la désescalade que de la course. L’un des 2 espagnols est très rapide. Je n’arrive pas à le distancer de plus de 5 mètres. Il me colle littéralement aux baskets. On ne voit déjà plus tard qui n’a voulu prendre de risque élevé sur la descente. Début de 3e bosse, j’ai creusé de 10 mètres de plus avec le 11e mais c’est dur. Il a l’air très déterminé à me croquer sur la dernière bosse. Je ne vois pas du tout le 9e en revanche. Il est vraiment devant. La 3e bosse n’est pas très longue (je dirais 15 min) mais très très pentue. Je continue de pousser et je le vois perdre des mètres petit à petit. Arrivé en haut de la bosse je vois la ligne d’arrivée en contrebas. Je suis 10e et je le resterai. Moi vivant je ne me fais pas doubler sur une descente.

Je suis un peu survolté du moment et content des 40 dernières minutes où j’ai bien négocié ma course. Je tente des trucs dans la descente un peu risqués, un mauvais appui et je sens une pré-crampe dans le mollet gauche. Une pré-crampe, c’est une crampe qui se signale et repart immédiatement, comme un avertissement. Ça veut dire que si je cours avec des appuis normaux cela se passera bien mais si je prends des risques et qu’à nouveau je fais un mauvais pas, c’est la crampe assurée sur le dernier km, et potentiellement de nombreuses et précieuses minutes de perdues…

Je finis donc en assurant le coup, sans trop pousser sur ce dernier kil, bien que le 9e finisse à 80 mètres devant moi. 10e de cette étape et je suis très content de moi !

Le cardio a super bien tenu, je me sens bien et hâte de découvrir mon classement… qui en fait n’a pas bougé.. je reste 11e au général, même si il y a eu des nouvelles entrées et des nouvelles sorties (une seule femme est devant moi au général contre 3 après l’étape de la veille). 

Jour 6 – Jeudi 28 septembre – Étape 3 (23km, 600m D+)

Nous voilà prêts pour la dernière étape. Enfin, l’épreuve d’hier a laissé des traces dans le groupe bien sûr. Marine et Antoine ont super mal au genou, Charline et Guillaume disent être très fatigués. L’énergie reste bien là car il s’agit bien là de notre dernier effort de la semaine. Les dernières forces à mettre dans la bataille.

Je suis en super forme toujours. La seule chose qui m’importe c’est de ne pas partir trop vite pour ne pas revivre les maux de ventre du premier jour. 

Le départ, comme pour la 1ère étape, est en différé. Malheureusement, cela va être compliqué de prévoir mon classement final car je suis parmi les derniers bus au départ. Je pars bon train et assez décidé à garder un minimum absolu de 10km/h malgré les 600m de dénivelé et le terrain sableux. Sur les 23km que nous avons au programme, je vise donc un 2h15/2h20 théoriquement…

Donc session de doublage infinie et ce jusqu’à la ligne d’arrivée – personne ne m’a dépassé ce jour là – ce qui me permet d’encourager tous les concurrents, grâce au pense-bête de leurs dossards… Au bout de quelques jours, je commence à connaître une majorité des participants. Quel plaisir d’échanger quelques mots en course avec tous ! 

Je me sens bien et tiens l’allure à mi-étape, malgré des bosses bien sabloneuses dans lesquelles courrir est impossible sans une déperdition d’énergie absolue. Donc, je les marche-cours à bonne allure, poussant sur les cuisses dans les raidillons car j’avais décidé de ne pas utiliser de bâtons sur le HMDS. Je trouve que c’était un poids inutile au regard du dénivelé qui était assez faible. Je les aurais pris sur un trail alpin mais pas sur un trail désertique. Cela dépend de votre niveau aussi, pour info les 20/30 premiers n’avaient plutôt pas de bâtons pour être léger et rapide et la grande majorité en avait ensuite.

J’essaye de monter continuellement la cadence mais les bosses très sabloneuses sont difficiles à courrir efficacement. Même si l’intensité que je mets est plus importante mon allure moyenne se dégrade un peu à cause du terrain. Je n’ai pas de maux de ventre, j’ai grignoté régulièrement (barres type Baouw) et bien bu (toujours 50/50 eau normale et eau avec des electrolytes). Je suis donc prêt à envoyer fort, dès que le sol deviendra plus rigide – courable…

17km déjà en 1h45 à peu prêt donc je suis toujours sur un bon rythme et en bonne forme pour le finish. Je double un participant qui me sort probablement les 2 pires phrases qu’on aurait pu imaginer à ce moment-là. 

1 : “ben qu’est ce qu’il se passe Stan, t’es blessé ??”

2 : “en fait c’est 26KM aujourd’hui pas 23.”

Bon, il pensait que l’on était dans le même bus, mais j’étais 30min plus tard que lui au départ et l’orga avait fait une erreur corrigée ensuite sur une story insta rappelant l’étape du jour. 

Simplement, j’avais pas le temps de lui expliquer tout cela et je cherche de l’énergie positive en course et c’était pas cet homme là ! Je lui ai dit : “tout va bien, je suis sûr que c’est 23, allez reste focus l’ami !” sans trop entendre sa réponse car j’étais déjà parti sur la relance d’après raidillon.

Les 5 derniers kilomètres sont assez planants avec de belles dunes. Je tourne une dernière petite vidéo qui me fait chialer évidemment. Je bombarde avec des pointes à 22km/h dans les descentes et 15km/h sur les quelques plats. Il ne s’agit pas d’accrocher un caillou avec son pied à ce moment là car je suis en train de prendre quand même quelques risques. Je hurle survolté sur tous les concurrents que je double dans ces derniers mètres pour les pousser à finir fort. 

5, 4, 3, 2, 1. La ligne se rapproche. 

Un dernier virage très serré à droite pour rentrer dans le village d’arrivée, la foule qui applaudit se décale du virage me voyant arriver lancé comme un wisigoth au combat. Ils ont peur que je rate la courbe et fasse un strike dans le public. On en passe pas loin en effet.  50 mètres. Puis cette ligne que je franchie épaules en avant comme un sprinter, suivi de mon cri d’arrivée pleins d’émotions bien sûr et de satisfaction de ma performance des 3 derniers jours. 

Dodo est là depuis 20 minutes, on se prend dans les bras. Un super moment que je n’oublierai pas. Il a fait une énorme course et arrive d’ailleurs 2e ou 3e de l’étape du jour. Je finis 11e de l’étape du jour. 12e au général. 

Le cri de la fin

La suite est pleine de belles ondes et festive. Chaque membre de la team arrive petit à petit. Goulven, Antoine, Juan, Greg, Marine, Raph, Charlotte, Charline et Guillaume. Une semaine très puissante que l’on n’oubliera pas. 

Une organisation solide et sympa. Très bons sur la prise et restitution de contenus aussi. Alors bravo à Cyril et sa team : Ferdi, Axelle et Laure notamment.

On reviendra en 2023 😉


Et si toi tu veux t’entraîner pour ce type de course en milieu désertique, on a un stage de préparation à l’ultra-trail dans le désert marocain pour toi 😎

Crédit photo: HMDS & Stanislas Gruau